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9 janvier 2011 7 09 /01 /janvier /2011 16:42

Paris, France (PANA) – La sécession, à l’issue d’un vote positif lors du référendum du 9 janvier au Soudan,  paraît être le moindre mal pour ce pays, si ses dirigeants arrivent à désamorcer les "bombes à retardement",  a estimé l'ancien ministre tchadien des Affaires étrangères, Acheikh Ibni Oumar, dans un entretien avec la PANA.

"Après cinquante années de guerre, la sécession paraît être le moindre mal. Néanmoins je pense qu'une séparation bien organisée, dans un climat apaisé, peut ramener la paix dans la région et permettre la reformulation d'une nouvelle forme de collaboration entre les deux entités. Car, objectivement, les deux futurs États ne seraient pas viables, s'ils se tournaient le dos ", a affirmé Acheikh Ibni Oumar.

Un référendum,  prévu par l'accord de paix conclu en 2005 après plus de vingt ans de guerre civile entre le régime de Khartoum et les rebelles du Sud à majorité chrétienne, va permettre ce dimanche aux Sud-Soudanais de choisir, lors du vote s'étalant jusqu'au 15 janvier, entre l'unité avec le Soudan ou la sécession.

Historiquement, a  ajouté l'ancien diplomate tchadien, depuis le "Closed District Ordinance Act" de1920, par lequel l’administration coloniale britannique avait imposé une frontière administrative, économique et sociale entre le Nord et le Sud, le Soudan n'a en fait jamais vécu comme un État unifié.

"L'erreur des régimes successifs de Khartoum central a été de croire que l'unité était à préserver, alors qu'en fait, elle était à créer", a souligné celui qui a été à la tête de  la diplomatie tchadienne  sous le règne de Hissein Habré entre 1989-1990.

Cependant, M. Ibni Oumar, a estimé que le référendum est organisé dans une certaine précipitation et a laissé des questions non-résolues qui pourraient s'avérer de véritables bombes à retardement.

Il a énuméré, entre autres, la délimitation de la frontière Nord-Sud, le droit de vote pour les originaires du Sud résidant au Nord, le sort des communautés tampon, la répartition des ressources et surtout de la dette, l'étouffement des contradicteurs des deux partis dominants au Sud et au Nord, etc.

"Si la classe politique soudanaise, même après la partition, arrivait à désamorcer ces bombes à retardement, cette situation pourrait même être une opportunité historique pour que nous réfléchissions tous ensemble sur la problématique de la construction de l’État-nation et de l'intégration régionale en des termes nouveaux. Cela permettra de transmettre à la génération montante un héritage moins lourd à gérer", a indiqué Acheikh Ibni Oumar. »

L'ancien diplomate tchadien ne veut pas non plus évoquer une nouvelle balkanisation de l’Afrique si demain d'autres communautés africaines voulaient suivre l'exemple du Sud Soudan.

Car, a-t-il dit, le risque de balkanisation en Afrique est ancien et n'a rien à voir avec le Soudan en citant la situation du Katanga, du Biafra, du Cameroun anglophone, de l'Ogaden, du Cabinda ou de la Casamance.

"Néanmoins, a-t-il indiqué, la situation actuelle comporte une nouveauté radicale. C'est la partie de poker menteur entre la Federal Reserve, la People's Bank of China (BOC) et les compagnies pétrolières américaines et chinoises. Ailleurs, les cartes  s'appellent bons du trésor, barrières tarifaires, polémiques monétaires, etc. Mais en Afrique, les cartes de ce poker s'appellent massacres ethniques, viols massifs et guerres post-électorales, sur fond de pillage des ressources naturelles ".

Pour M. Ibni Oumar,  les frontières des intérêts économiques des grandes puissances sont en conflit avec les frontières juridiques, d'où la tentation d'ajustements sanglants.

Selon lui, "il appartient aux élites africaines, gouvernements et oppositions, de prendre conscience du danger, de transcender les addictions au pouvoir et à l'argent facile,  pour relever ces grands défis".

Acheikh  Ibni Oumar, qui a été conseiller spécial du président Idriss Deby Itno entre 1990-1991 après que ce dernier a renversé Habré, a occupé le poste d’ambassadeur du Tchad aux Etats-Unis et celui de haut-représentant auprès des Nations unies; en fin 1999, Il a rompu avec le pouvoir de N’Djaména et rejoint la rébellion armée.

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